Déclaration à la presse de Jean-Yves Le Drian, ministre de l’Europe et des Affaires étrangères (Doha, 28 mars 2022)

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Merci cher ami, je suis très heureux d’être de nouveau présent ici à Doha après avoir accompagné le Président de la République en décembre dernier. Je suis très heureux d’être ici pour une année où nous célébrons le 50e anniversaire de l’établissement de nos relations diplomatiques.

J’ai eu l’honneur d’être reçu par Son Altesse l’Émir et nous avons eu aussi des entretiens avec mon collègue Saad Al Kaabi, ministre de l’Énergie et évidemment je suis très heureux de retrouver avec plaisir, comme à chaque fois, Cheikh Mohammed qui est mon interlocuteur quasiment en permanence sur toutes les questions que nous avons abordées ensemble.

C’est mon 24ème déplacement au Qatar et je ne m’en lasse pas. Donc ça témoigne aussi de la force de notre relation, de la force de la relation entre nos deux pays parce que le Qatar est un pays ami, un partenaire solide avec lequel nous entretenons un dialogue politique étroit et le partenariat stratégique en est l’illustration. Nous avons pour unique préoccupation la sécurité et la stabilité régionale et internationale. Depuis la visite du Président de la République à Doha, les conditions de sécurité et de stabilité internationales ont été entièrement bouleversées par l’invasion de l’Ukraine, l’offensive planifiée et lancée par la Russie, et bien sûr une violation flagrante de la Charte des Nations-Unies et de tous les principes du droit international et de l’architecture internationale de paix et de sécurité, comme l’ont souligné les votes intervenus à l’Assemblée générale des Nations unies avec le soutien du Qatar et avec les partenaires du Conseil de Coopération du Golfe.

Cette offensive russe est aussi une menace directe pour les intérêts de sécurité de l’ensemble du continent européen et, au-delà, je le dis avec aussi beaucoup de gravité, cette offensive est lourde de conséquences pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord comme pour l’ensemble des équilibres mondiaux y compris sur les plans énergétique et alimentaire. La France est donc déterminée à se coordonner étroitement avec ses partenaires et ses amis dans la région du Golfe.

Ce que je voulais vous dire aussi à cet égard, c’est que le droit international ne se partage pas et que, si nous sommes extrêmement vigilants pour condamner toutes les infractions qui viennent d’être commises par la Russie à l’égard du droit international, cette condamnation vaut pour tous ceux qui rompent les règles du droit international, que ce soit en Syrie que ce soit au Proche-Orient. C’est la même volonté de la France et, je le sais, la même volonté du Qatar de faire respecter l’architecture internationale et la Charte des Nations Unies et les résolutions du Conseil de sécurité, quel que soit le lieu et quels que soient les acteurs.

Je voulais aussi dire que dans nos entretiens, nous avons eu des conversations très utiles sur la mise en œuvre de notre dialogue politique et de notre partenariat stratégique sur les questions de défense, de sécurité et de lutte contre l’extrémisme, sur les échanges humains, sur le domaine de la culture, de l’éducation, et du sport et aussi évidemment sur les questions énergétiques et sur les questions liées aux investissements.

Il est clair que nous devons agir ensemble, aujourd’hui, sur les nouveaux enjeux qui sont posés en matière de sécurité des approvisionnements énergétiques et en matière de sécurité alimentaire de la planète, et sur ces deux sujets, nous avons eu des échanges extrêmement positifs.

Nous voulons rappeler l’importance de conclure l’accord sur le nucléaire iranien. Nous sommes près d’un accord. Nous partageons le même diagnostic et la même nécessité. Et il importe que les quelques points qui restent à régler, qui sont marginaux par rapport à la démarche initiée dans le cadre du JCPOA -ils ne sont pas secondaires mais ils sont marginaux par rapport au JCPOA - que cela puisse se régler le plus vite possible. Cela serait un signe positif à l’égard d’une situation anxiogène au niveau international, et nous avons l’un et l’autre rappelé notre ferme attachement à la stabilité et à la sécurité régionales. Nous avons aussi évoqué la situation au Liban, et nous sommes tout à fait en phase pour dire que le rétablissement de la situation au Liban passe avant tout par la mise en œuvre par les autorités libanaises des réformes nécessaires pour répondre aux besoins de la population libanaise. Et nous avons souligné l’importance que les élections législatives qui se tiennent le 15 mai prochain puissent se tenir dans l’impartialité et la transparence. Et nous allons agir ensemble pour continuer d’apporter un soutien direct à la population libanaise.

J’ai aussi rappelé la reconnaissance de la France pour le soutien décisif apporté par le Qatar dans le contexte de la crise afghane et nous avons aussi poursuivi nos concertations sur la question afghane avec le constat dommageable que les principes sur lesquels des engagements avaient été pris concernant les droits de l’Homme, concernant la représentativité du gouvernement, concernant la rupture des liens avec Al-Qaïda, concernant le droit des femmes en particulier, tout cela n’était pas au rendez-vous. En particulier, les récentes décisions concernant l’interdiction aux jeunes femmes de poursuivre leurs études, ont fait l’objet de notre part d’échanges et de condamnation commune. En en même temps la volonté de continuer à essayer d’avancer pas à pas avec les autorités afghanes et nous saluons à cet égard les efforts effectués par le Qatar.

Et je voudrais conclure en disant que j’ai eu un grand plaisir à participer au Forum de Doha hier et aussi à constater la convergence de vues que nous avons de plus en plus sur les grands dossiers internationaux, et le rôle très important qu’a acquis la diplomatie qatarienne sur des dossiers sensibles et aussi le rôle très important que votre diplomatie, cher ami, a pu acquérir pour être un outil de médiation dans les situations conflictuelles. Je pense en particulier aux efforts que vous fournissez pour essayer d’aboutir à une solution pacifique de la transition au Tchad, puisque les médiations se déroulent sous votre autorité.

Voilà, Mesdames et Messieurs, ce que je voulais vous dire en renouvelant ma satisfaction d’être ici et d’avoir un partenaire stratégique efficace, offensif, anticipateur et qui traduit à nouveau la qualité de la relation qui existe entre le Qatar et la France au moment où nous fêtons les 50 ans de nos relations diplomatiques.

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